TRAQA

TRAQA

TRANSPORT ET QUALITE DE L’AIR AU DESSUS DE LA MEDITERRANEE

Entouré de chaines de montagnes et par différents continents, et affecté par divers types de pollution, le bassin Méditerranéen est un véritable laboratoire naturel pour l’étude de la variabilité de la composition chimique dans les basses couches et l’interaction entre les polluants provenant de régions éloignées. Dans le cadre du programme ChArMEx (Chemistry and Aerosol Mediterranean Experiment), nous avons mené une campagne de terrain sur le bassin méditerranéen nord-ouest au cours de l’été 2012 pour documenter la pollution gazeuse et particulaire, en utilisant des moyens instrumentaux importants (avion instrumenté, des ballons pressurisés de couche limite et des sondages réguliers, ..)

Coordinateur Jean-Luc Attié (Université de Toulouse III)
Correspondant CNRM-GAME Jean-Luc Attié
Équipes CNRM-GAME GMGEC/CAIAC & CARMA - GMEI/TRAMM
Site Internet du projet TRAQA
Type INSU
Début Juin 2012
Durée Juillet 2012

 Objectifs proposés

1- La caractérisation des processus dynamiques d’export de masses d’air polluées depuis les régions sources du bassin

2- La quantification des échanges entre la couche limite et la troposphère libre

3- Le suivi lagrangien du vieillissement et du mélange des panaches de pollution dans la basse troposphère

4- L’analyse de la représentativité des cas d’étude sur une période de temps plus longue.

L’expérience TRAQA a été réalisée en déclenchant sur alerte des périodes d’observation intensive (POI) lorsque les conditions étaient favorables. Un total de 7 POIs ont été menées avec près de 60 h de vols avions et 5 vols de ballons de couche limite. Ainsi, nous avons documenté un épisode de pollution dans le golfe de Gênes, un cas Mistral modéré établi, un cas extrême de poussière africaine, un cas d’exportation de la pollution de Barcelone vers la mer Méditerranée, et un cas de départ de Mistral. Les deux POIs restantes, menées dans des conditions anticycloniques d’été classiques, ont été consacrés à des mesures aéroportées des émissions biogéniques de végétations méditerranéennes, et à une documentation régionale des principales sources de pollution anthropique sur la côte nord de la Méditerranée. Les données sont maintenant disponibles depuis le site WEB http://mistrals.sedoo.fr/ChArMEx/TRAQA/

 Moyens mis en oeuvre

Pour la campagne TRAQA, le CNES nous a mis à disposition son infrastructure de lâcher de ballons ainsi que 5 Ballons Pressurisés de Couche Limite (BPCL) dont trois disposaient de sondes PTU et ozone et deux uniquement de sondes PTU. Un système de suivi des ballons en temps réel sur internet permettait de suivre les trajectoires des BPCL . Pour les POIs de suivi Lagrangien (cas du 27 Juin et cas du 6 et 7 Juillet), le couplage « avion – BPCL » a évolué dès le début de la campagne d’une stratégie de 1 POI de 2 jours à 2 POI d’une journée à cause des zones de survol réduites (contrôle aérien) et d’un retour d’expérience entre les POIs. En effet, le suivi de la masse d’air le lendemain a paru difficile et risqué à cause de sa vitesse et de la limitation de la zone de survol. Pendant les deux POIs de suivi lagrangien, des sondages libres étaient lancés sur le site de lâcher pour pouvoir échantillonner la structure verticale de l’atmosphère (PTU, vent et pour certains les aérosols (LOAC)) et aussi contrôler la bonne direction du vent pour le lancer des BPCL.

Infrastructure du site de lâcher des ballons proche de Martigues à Sausset-les-Pins (photos de F. Dulac)
Trajectoire des ballons réalisées en quasi temps réels . Trois BBCLs ont atteint la Corse et deux la Sardaigne

La modélisation a été assurée en grande partie par le CNRM-GAME en mode analyse comme en mode prévision pendant la campagne expérimentale TRAQA. Le CTM MOCAGE de Météo-France et le modèle de trajectographie BAMED ont permis de suivre les panaches de pollutions et de permettre de définir les plans de vols avions ainsi que les lâchers de BPCL .

Le principal vecteur de mesure de la campagne TRAQA est l’avion de recherche atmosphérique ATR-42 (mis en oeuvre par SAFIRE) avec une configuration instrumentale augmentée par rapport à l’instrumentation en mode standard SAFIRE (ozone et monoxyde de carbone (instrument MOZART), vapeur d’eau et dioxyde de carbone (Li7500), pression, température, PCASP-SPP200 (distribution de la taille des aérosols de 0.1 à 3 µm) et vent (lent et rapide). Dans cette configuration en mode standard, se rajoute la mesure du rayonnement (Tri-bande IR (« Climat » / Cimel-CE332), LW et SW hémisphériques (K-Z)). Le lidar LNG (LATMOS) était embarqué permettant de donner la stratification atmosphérique en aérosols (profils verticaux @355, 532, 1064 nm et la dépolarisation à 355 nm). De plus se rajoutait à cette configuration la veine AVIRAD et les instruments associés (prélèvements sur filtres, néphélomètre et granulomètre) ainsi qu’un PTR-MS (mis en oeuvre par le LISA-LATMOS) pour la mesure de composés organiques volatils et le système MEDEE (LA) pour la mesure de flux par méthode DEC (Disjunct eddy correlation).

Position des différents paliers avion réalisés pendant l’expérience complète TRAQA. En tout 60 h de mesures ont pu être réalisées sur 7 POIs. Les couleurs représentent les différents vols réalisés pendant la campagne.

 Résultats obtenus

Autour de cette campagne, plusieurs laboratoires se sont regroupés pour permettre de réaliser la campagne expérimentale (LA, CNRM-GAME, LATMOS, LISA, LSCE et LPC2E). Durant l’expérience TRAQA, nous avons réalisé 7 périodes d’observation intensive totalisant environ une soixantaine d’heures avion sur 15 jours d’expérience. Ainsi, nous avons documenté un épisode de pollution dans le golfe de Gênes, un cas de Mistral modéré établi, un cas extrême de poussières africaines, un cas d’export de la pollution de Barcelone vers la mer Méditerranée, et un cas de départ de Mistral. Les deux périodes d’observation restantes, menées dans des conditions anticycloniques d’été classique, ont été consacrées à des mesures aéroportées des émissions biogéniques de végétations méditerranéennes, et à une documentation régionale des principales sources de pollution anthropique sur la côte nord de la Méditerranée.

Un premier résultat des mesures sur les cas de Mistral montre d’une part que la pollution exportée sur la Méditerranée est relativement faible pendant les cas étudiés (pour les concentrations d’ozone) et d’autre part que le modèle de chimie transport impliqué dans la campagne surestime légèrement l’ozone et le monoxyde de carbone. Ceci que ce soit en comparaison avec les mesures aéroportées comme avec les mesures des Ballons Pressurisés de Couche Limite. Une première étude montre l’influence des cadastres d’émissions utilisés dans les modèles de chimie-transport.

Concernant les aérosols, nous avons entrepris de faire une inter-comparaison de modèles régionaux avec pour référence les observations de l’expérience TRAQA. Cette inter-comparaison a permis de montrer que la plupart des modèles sont capables de reproduire la variabilité spatio-temporelle quotidienne des aérosols désertiques sur le bassin méditerranéen, ainsi que des événements particuliers de remontées de ces poussières comme le cas exceptionnel de fin juin 2012 bien documenté pendant la campagne TRAQA. Cependant, de grandes différences ont été constatées entre les modèles, notamment en terme d’intensité des pics d’aérosols, et de leur étendue spatiale. Le cas de fin juin 2012 est bien reproduit par les modèles malgré une sous-estimation des épaisseurs optiques. En termes de distribution verticale et granulométrique, les premiers modèles comparés montrent également des résultats satisfaisants.

Grâce à un instrument spécialement développé pour la mesure aéroportée des flux biogéniques, des valeurs satisfaisantes d’émissions d’isoprène et de monoterpènes ont pu être obtenus sur la forêt des Landes. Il est prévu de refaire des campagnes d’observation à partir de 2014 sur les végétations typiques de la région méditerranéenne (quercus pubescens, quercus ilex…), au sol et en avion, de façon à constituer un jeu de données permettant d’améliorer la paramétrisation des émissions de composés organiques volatils biogéniques.

De haut en bas : champs d’ozone (ug/m3) et de vent horizontal (représenté par les flèches) prévus par le modèle MOCAGE à 500 m d’altitude pour le 6 juillet 2012 à 09:00 Tu et 15:00 Tu et le 7 juillet à 15:00 TU avec la trajectoire de l’avion en trait plein noir.

Coefficient de rétro diffusion [u.a] observé par le lidar embarqué sur l’ATR 42 LNG pour la journée du 3 juillet 2012 du 13:39 à 15h00. On distingue nettement une couche d’aérosol qui diminue au fur et à mesure du temps.
Epaisseur optique mesuré par SEVIRI le 29/06/2012 (produit AERU-GEO, Carrer et al.,2010)

 Partenariat mis en place

Autour de cette campagne, plusieurs laboratoires se sont regroupés pour obtenir ces résultats (LA, CNRMGAME,
LATMOS, LISA, LSCE et LPC2E). Le Laboratoire d’Aérologie (LA) avait la responsabilité de l’expérience,
des ballons pressurisés de couche limite et de la mesure des flux biogéniques, le LATMOS de l’avion
instrumenté, le CNRM-GAME de la modélisation et de la prévision des différentes espèces (gaz et aérosols)
concernant la campagne TRAQA, le LISA de la mesures des aérosols et le LPC2E des mesures des aérosols
par sondage. Le LSCE a également assuré la coordination scientifique et logistique de l’ensemble des
opérations mise en oeuvre pendant la pré-campagne ChArMEx 2012 articulée autour de la campagne aéroportée
TRAQA, avec notamment le déploiement d’un super site au Cap Corse pour des mesures in situ
complémentaires de gaz et d’aérosols. Ce groupement de laboratoires de recherche a reçu l’appui logistique de
SAFIRE (laboratoire qui s’occupe de l’avion instrumenté) ainsi que du CNES pour le lancer des ballons. Nous
avons aussi un partenariat avec l’université de Barcelone pour la mesure des aérosols avec leurs LIDARS. Les
observations sont maintenant mises à la disposition de la communauté scientifique grâce à la base de données
MISTRALS/ChArMEx à l’OMP/SEDOO, facilitant le développement de nombreuses collaborations nouvelles.